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Voici un reportage sur Vida Nueva, une ONG du Costa Rica qui s'occupent d'enfants des rues au Costa Rica. Reportage réalisé après séjour sur place. Article encore non publié.


Vida Nueva : L'autre cirque du soleil

 

En Allemagne et en Autriche, les jeunes peuvent troquer le service militaire pour une alternative très prisée : passer un an à l’étranger en montant un projet social. C’est ainsi qu’au Costa Rica, une école de cirque est née... Avec beaucoup de débrouille.

 

 

 

C’est le mois de décembre et le soleil tape dur. Les enfants cherchent l’ombre sous les palmiers. Mais les éducateurs sont sans pitié : il faut travailler sans relâche pour le spectacle de noël. A San Isidro de El General, Costa Rica, une poignée de jeunes européens a trouvé une « vie nouvelle » : Vida Nueva, c’est le nom de l’ONG qui leur permet d’animer une école de cirque pour les enfants des quartiers difficiles.


Niels, Fabian, Tobias et Alexandra ont entre 18 et 21 ans. Ils sont tous allemands ou autrichiens et dans leur pays, c’est l’âge du service militaire ; eux ont choisi une alternative, plus longue (12 mois au lieu de 8) mais plus riche sur le plan humain : le service social à l’étranger. Ils sont devenus des « zivis », comme on dit dans leurs pays. Au lieu d’apprendre à manier des armes, ils vont monter un projet socio-culturel dans le pays de leur choix, le tout avec une bourse de leur gouvernement. Sous le soleil des tropiques, aucun n’a l’air de regretter, à l’image de Niels : « En Allemagne, on respecte mon choix de ne pas vouloir passe 8 mois dans l’armée. J’ai eu la chance de trouver cette association, Vida Nueva, et j’ai débarque au Costa Rica il y a 4 mois, sans connaître personne. »


Habilitée à recevoir des « zivis » par les gouvernements allemand et autrichien, l’ONG a été fondée il y a 7 ans par Roland Spendlingwinner, un autrichien de 60 ans, amoureux du Costa Rica de longue date. Là-bas, il a décidé de mettre en place une association qui permettrait aux enfants des quartiers pauvres de s’évader de leur quotidien à travers le cirque, la musique ou le théatre. « Chaque volontaire apporte ce qu’il sait faire, nous explique Roland. La bonne volonté importe plus que tout : certains ne savaient rien du cirque en arrivant. » Mais l’alchimie a fonctionné et depuis 3 ans, l’école de cirque tourne à plein régime. « Nous avons aussi des projets plus ponctuels, selon les volontaires qui arrivent. Par exemple, nous avons eu des ateliers de théatre, de photo et de musique. »


Les enfants de l’école de cirque, au nombre de 15, sont recrutés dans les quartiers les plus pauvres de la ville. A San Isidro de El General, capitale de la province de Perez Zeledon, la crise des cours du café a frappé plus durement qu’ailleurs. Les problèmes liés au chômage et à la drogue sont récurrents. L’aide publique est inexistante. Josué, 9 ans, est dans l’école de cirque depuis février 2007. Il sait différencier l’odeur de la marijuana de celle de l’héroine, « la piedra » comme on l’apelle ici. Membre d’une fratrie de 9 enfants, il vient de Cocori, un quartier réputé comme le plus dangereux de la ville, aussi surnommé le « quartier rouge ». Il a un grand frère en prison, un autre en désintoxication. Avec son petit frère, Byron, ils cherchaient de l’aluminium à la décharge publique quand les zivis l’ont rencontré. Ce métal se revend pour quelques centimes le kilo et de nombreux enfants de Cocori le recherchent chaque jour. A l’école de cique, il apprend la vie en groupe, encadré par les « gringos », comme les volontaires se font appeler. « L’école de cirque m’apprend à être sage, à respecter les autres, à avoir plus de discipline, me dit Josué. Comme à l’école, mais en plus amusant ! »


« Avec ces enfants, le plus gros du travail est fait au niveau de la confiance en soi, assure Alexandra. Ils n’ont que des contre-modèles dans leur quartier. Certains arrêtent d’aller à l’école à 9 ans. Leur réalité est très dure. A travers le cirque, ils se révèlent créatifs, ils découvrent qu’ils sont capables de faire des choses insoupçonnées, positives. Et quand ils retournent dans leur quartier, ils montrent à leurs copains ce qu’ils ont appris. »


Pour les volontaires, l’expérience est incomparable. Aucun ne regrette d’être parti à l’aventure, à 10 000 km de son pays, sans connaître personne au Costa Rica. Le « zivi » doit rester 1 an dans le pays de destination. Une fois arrivé, c’est le système D : il y a peu de moyens, mais il y a des idées. Ceux qui ne savaient rien du cirque ont du apprendre avant d’enseigner aux enfants. Ils se sont improvisés moniteurs, éducateurs. Pour la plupart, c’est la première expérience d’animation culturelle. Alors on ne s’ennuie jamais. L’école de cirque fonctionne ainsi depuis 2003, et à chaque nouvelle vague de volontaires, les nouveaux doivent refaire le travail d’apprentissage. Seule Alexandra reste pour transmettre l’esprit d’une génération à une autre. Cette autrichienne de 21 ans est arrivée dans l’ONG il y a 2 ans. Elle est devenue une membre permanente de Vida Nueva. « Je suis tombée très vite amoureuse du Costa Rica et des enfants. Mon année de « zivi » est passée tellement vite qu’à la fin, je n’avais pas le coeur à rentrer en Autriche. » Tobias, 21 ans, a pris la même décision. Il est à San Isidro depuis 18 mois. Ensemble, ils forment le noyau dur des volontaires.


Leur acharnement a fait des miracles : le cirque « Fantazztico » est né et a commencé à donner des représentations, d’abord confidentielles, en décembre 2003. Puis les spectacles se sont enchaînés et les enfants ont pu se produire dans tout le Costa Rica, avec un succès grandissant. Sur scène, la magie prend : clowns, jongleurs, pyramides humaines... Les numéros se succèdent et surprennent sans cesse le public. Les spectacles remplissent maintenant sans difficulté la salle polyvalente de la ville, qui peut accueillir 600 personnes.


Les volontaires ont du apprendre à se débrouiller sans argent. Les aides qu’ils reçoivent en tant que zivis ne permettent pas au cirque de rouler sur l’or. L’association a bien un peu de ressources, mais Roland a choisi de l’utiliser en accordant des bourses aux familles les plus nécéssiteuses, pour payer l’école aux enfants. Les zivis fabriquent donc les costumes au moindre coût. Pour emmener les enfants en week-end d’entraînement, ils font un spectacle au marché de la ville et récoltent les légumes donnés par les commerçants. Lors des spectacles, ils s’improvisent techniciens et apprennent à gérer les lumières et le son.


Le comportement de ces enfants est parfois difficile à gérer. Certains se montrent violents au sein du cirque. Plusieurs ont déjà été évincés au nom de la discipline collective. Le projet est également dépendant de la qualité des volontaires qui arrivent ; même si Tobias et Alexandra assurent une continuité, la plupart ne restent pas plus d’un an et certains projets, comme les ateliers de photo et celui de musique, sont morts, faute de repreneur. Malgré ces difficultés, le cirque Fantazztico va feter ses 5 bougies cette année. Et surtout, à l’été 2007, ils ont pu réaliser un rêve : grâce à une subvention du gouvernement autrichien, les volontaires ont pu emmener les 15 enfants en Europe pour une tournée en Suisse, en Autriche et en France. Pendant 3 semaines, 16 représentations et des rencontres avec des cirques locaux ont eu lieu dans de nombreuses villes, dont Vienne et Paris. Les enfants garderont des souvenirs inoubliables, comme la neige des Alpes suisses, ou l’escapade sur la Tour Eiffel. Roland a bon espoir d’organiser une tournée similaire en 2009 : «  De plus, dit-il, la tournée nous a permis de lever des fonds en Europe et nous construisons actuellement une nouvelle salle de spectacle dédiée au cirque. »


Pour les enfants, la plupart entre 8 et 12 ans, apprendre un métier dans le monde du cirque est un horizon lointain. Mais l’apport principal de l’école de cirque est ailleurs : vivre en groupe, se respecter, apprendre la valeur du travail... Et pour les plus talentueux, il existe toujours l’espoir d’une vie nouvelle, comme pour Josué. Doyen des élèves de l’école de cirque, aujourd’hui agé de 20 ans, il est parti en Europe grâce à l’association, et travaille comme clown à Barcelone. Et pour Nils, Fabian, Tobias et les autres, c’est sans doute le début d’une vocation à travailler dans des ONG. Pour tous, une vie nouvelle.



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